Fiscal
Relations avec l'Administration fiscale
29 mars 2024

Création d’un office central de lutte contre les fraudes aux finances publiques

Le Service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF) est transformé à compter du 1er mai 2024 en Office à compétence nationale de lutte contre les fraudes aux finances publiques (ONAF) avec des compétences élargies.

 

Dans le cadre du plan de lutte contre la fraude fiscale et douanière présenté par le ministre chargé des comptes publics en mai 2023, un renforcement de la judiciarisation des fraudes avait été annoncé avec :

  • l’extension du modèle de la « police fiscale » à toutes les fraudes aux finances publiques du haut du spectre ;

  • la transformation du service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF) en Office national anti-fraude (ONAF).

 

Un décret du 18 mars 2024 porte création d’un service à compétence nationale dénommé « Office national antifraude » (ONAF), rattaché conjointement au directeur général des douanes et droits indirects et au directeur général des finances publiques, qui se substitue au SEJF (D. n° 2019-460, 16 mai 2019 abrogé).

Cet office entend améliorer la lutte contre les fraudes aux finances publiques, qu’elles soient nationales ou commises au préjudice de l’Union européenne, le démantèlement des structures de fraude et contre le blanchiment par l’identification des flux financiers illicites générés par ces fraudes et la saisie des avoirs criminels.

 

Entrée en vigueur - Le présent décret entre en vigueur le 1er mai 2024 (D. n° 2024-235, 18 mars 2024, art. 12).

 

Toutefois, dans une intervention du 20 mars 2024, le premier ministre a précisé que le nouveau service sera pleinement opérationnel le 1er juillet 2024 (Gouvernement, dossier de presse, 20 mars 2024).

Domaines d’intervention et missions élargis

 

Domaines d’intervention - Dans le cadre de sa mission de lutte contre la fraude aux finances publiques, le domaine d’intervention de l’ONAF est élargi à toutes les infractions portant atteinte aux finances publiques, qu’elles se rapportent aux recettes, aux dépenses et aux fonds ou aux avoirs publics :

  • infractions en matière de contributions indirectes ;

  • infractions prévues aux articles 1741 et 1743 du CGI (délit général de fraude fiscale et délit comptable) lorsqu’il existe des présomptions caractérisées que ces infractions résultent de manoeuvres destinées à égarer l’Administration (LPF, art. L. 228, II, 1° à 5°) ;

  • escroqueries sur la TVA (D. n° 2024-235, 18 mars 2024, art. 2, I).

 

L’ONAF intervient dans le respect des attributions des offices centraux de police judiciaire, notamment l’Office central de lutte contre le travail illégal et l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales, avec lesquels il coopère et se coordonne sur l’exercice de leurs domaines d’attribution respectifs (D. n° 2024-235, 18 mars 2024, art. 2, II).

 

Missions - Dans ce cadre, l’ONAF est chargé :

  • de procéder sur l’ensemble du territoire national à des enquêtes judiciaires ;

  • d’animer et de coordonner, sous la direction de l’autorité judiciaire dans la conduite des enquêtes, à l’échelon national et au plan opérationnel, les recherches et les investigations de police judiciaire ;

  • de recueillir, centraliser et exploiter tout renseignement ou information entrant dans son domaine d’intervention à des fins stratégiques, opérationnelles ou documentaires, y compris ceux portant sur les fraudes et les phénomènes criminels mis en évidence dans le cadre des enquêtes judiciaires, pour renforcer la lutte contre les fraudes douanières et aux finances publiques et favoriser une meilleure circulation de l’information entre les administrations, services et organismes concernés ;

  • d’étudier et de participer à l’étude, avec les ministères, les organismes publics et privés et les organismes européens et internationaux, des moyens préventifs et répressifs à mettre en oeuvre ;

  • d’effectuer ou poursuivre à l’étranger des recherches entrant dans son domaine d’intervention.

Pour accomplir sa mission, l’office centralise, traite, exploite et transmet aux administrations, services et organismes sociaux ainsi qu’aux autorités judiciaires, toutes documentations et informations relevant de leur domaine de compétence.

Renforcement des ressources et maillage territorial

 

Maillage territorial - Comme le SEJF auparavant, l’ONAF comprend un service central et 10 unités locales (D. n° 2024-235, 18 mars 2024, art. 7).

Le siège de chacune de ces unités territoriales est situé à Bordeaux, Fort-de-France, Lille, Lyon, Marseille, Metz, Nantes, Paris et Toulouse. Deux unités territoriales sont implantées à Paris (A. n° ECOP2332108A, 18 mars 2024 : 20 mars 2024).

 

Personnel affecté - Sont affectés à l’Office national anti-fraude :

  • les officiers de douane judiciaire habilités (ODJ) (CPP, art. 28-1) ;

  • les officiers fiscaux judiciaires habilités (OFJ) (CPP, art. 28-2), lorsqu’ils sont placés au sein du ministère chargé du budget ;

  • les nouveaux agents de police judiciaire des finances (APJ-F) (CPP, art. 28-1-1 ; L. n° 2023-610, 18 juill. 2023, art. 21 : JCPE 2023, n° 30, act. 681).

Le directeur de l’ONAF est un magistrat de l’ordre judiciaire qui exerce ses fonctions auprès du directeur général des douanes et droits indirects et du directeur général des finances publiques.

 

Remarque : Le Premier ministre et le ministre délégué chargé des Comptes publics ont présenté, le 20 mars 2024, un bilan d’étape du plan de lutte contre les fraudes sociales, fiscales et douanières. Selon le dossier de presse, l’État a renforcé les effectifs de lutte contre la fraude, déployé de nouveaux outils et durci ses sanctions à l’encontre des fraudeurs.

D’ici 2027, de nouveaux moyens seront déployés grâce à un renforcement humain et budgétaire des services.

Parmi les mesures déjà mises en place, nous pouvons citer :

  • en matière de fraude fiscale :

    • l’augmentation de 25 % du nombre de contrôles fiscaux sur les particuliers aux plus hauts revenus ;

    • la possibilité pour le juge de priver les fraudeurs de leurs crédits d’impôts ;

    • la poursuite de la lutte contre l’optimisation fiscale internationale. En plus de la mise en place d’un impôt minimum mondial pour les multinationales, l’administration fiscale dispose désormais d’une meilleure capacité à détecter les prix de transfert abusifs des multinationales.

  • en matière de fraude aux cotisations sociales et aux prestations sociales :

    • l’augmentation des redressements Urssaf de 50 % sur la fraude sociale des entreprises, avec 1,2 milliard d’euros redressés en 2023 (contre 800 millions en 2022 et 500 millions en 2017) ; grâce, en particulier, à la mise en place en 2023 d’un guichet de régularisation des micro-entrepreneurs qui a permis 34 millions d’euros de redressements (le Premier ministre a décidé de rehausser les objectifs sur le quinquennat de 10 % et ainsi de fixer à l’Urssaf une cible de 5,5 milliards d’euros de redressements) ;

    • le perfectionnement des outils des CAF qui a permis de doubler les détections de fraudes à la résidence pour un montant de 97 M €, le doublement des contrôles de retraités résidant à l’étranger par l’assurance vieillesse et la détection de 750 dossiers frauduleux et l’intensification en 2023 des actions contentieuses engagées en matière de santé (de plus de 60 %).