Projet de loi de finances pour 2025

Les principales mesures du projet de loi de finances pour 2025.
Le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 a été présenté en Conseil de ministres et à la presse le jeudi 10 octobre 2024 par le ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie et le ministre auprès du Premier ministre, chargé du Budget et des Comptes publics. Le texte officiel a été déposé le même jour au Parlement sous le n° 324.
Nous présentons ci-après de manière synthétique les mesures fiscales nous intéressant telles qu’elles résultent du dossier remis à la presse et du texte du projet.
Le projet sera examiné par la commission des finances à compter du 16 octobre et son examen en séance publique par l’Assemblée nationale débutera le 21 octobre 2024.
Fiscalité des particuliers⚓
Parmi les mesures fiscales annoncées par le Gouvernement, on peut notamment citer :
l'actualisation du barème de l’IR 2024 (Art. 2, I, B, 1°) ;
la revalorisation directe de certains seuils, plafonds et abattements (Art. 2, I, A et B, 2° et 3°) ;
l'actualisation pour 2025 des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source (Art. 2, I, C et II) ;
l'actualisation de divers seuils et limites indexés sur le barème de l’IR (Art. 2) ;
l'aménagement du régime des plus-values immobilières des loueurs en meublés non professionnels (Art. 24) : Afin d’assurer une plus grande équité entre les loueurs en meublés professionnels et les loueurs en meublés non professionnels, il serait désormais tenu compte du montant des amortissements déduits fiscalement pour déterminer le montant de la plus-value immobilière imposable. Autrement dit, le prix d’acquisition du bien serait minoré des amortissements déduits fiscalement (à l’exception de ceux constitutifs de dépenses prises en compte pour la détermination de l’impôt sur le revenu) augmentant ainsi le montant de la plus-value imposable (CGI, art. 150 VB modifié). À défaut de précisions dans le texte, ces dispositions s’appliqueraient aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2025 (Art. 1er, II, 3°) ;
l'instauration d’une contribution différentielle sur les hauts revenus (Art. 3) : Pour contribuer au redressement des comptes publics, les contribuables fiscalement domiciliés en France dont le revenu de référence excède les seuils d’assujettissement à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), à savoir 250 000 € pour un célibataire et 500 000 € pour un couple soumis à imposition commune, seraient soumis à une imposition minimale égale à 20 % de leurs revenus. Cette contribution serait égale à la différence, lorsqu’elle est positive, entre :
– le montant résultant de l’application d’un taux de 20 % au revenu de référence ;
– et le montant résultant de la somme de l’IR (majoré du montant de certains crédits et réductions d’impôt) et de la CEHR, et de certains prélèvements libératoires de l’IR, majoré de 1 500 € par personne à charge du foyer fiscal et de 12 500 € pour les contribuables soumis à imposition commune.
Une décote serait mise en oeuvre pour les contribuables dont le revenu de référence est inférieur ou égal à 330 000 € pour un célibataire et à 660 000 € pour les couples soumis à imposition commune (CGI, art. 224 nouveau).
Ces dispositions s’appliqueraient à l’imposition des revenus des années 2024 à 2026 (Art. 3, III, A).
Impôts locaux⚓
Parmi les mesures fiscales relatives aux impôts locaux, on peut citer :
la clarification des modalités de calcul de l’atténuation des variations de valeurs locatives des locaux professionnels (Art. 16) : Les résultats de la réforme du mode de détermination des valeurs locatives (VL) des locaux professionnels ont été intégrés pour la première fois pour l’établissement des bases de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de la cotisation foncière des entreprises (CFE) au titre de l’année 2017. Ces résultats ont fait l’objet de plusieurs dispositifs d’entrée en vigueur progressive, destinés à atténuer temporairement les effets de la réforme :
un coefficient de neutralisation, calculé en 2017 pour chaque impôt et chaque collectivité et appliqué à la valeur locative, de façon à s’assurer que la proportion des bases des locaux professionnels dans les bases foncières totales de la collectivité reste constante, dans l’attente de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation ;
deux mécanismes atténuateurs arrivant à échéance en 2025 :
un dispositif de lissage qui permet de répartir sur 10 années la variation de cotisations résultant de la réforme,
un dispositif dit de « planchonnement » (constitué d’un plancher et d’un plafond) de la valeur locative, qui a pour objet de réduire de moitié les variations constatées, tant à la hausse qu’à la baisse, entre l’ancienne valeur locative et la nouvelle valeur révisée.
Par deux décisions du 3 avril 2024, le Conseil d’État a considéré que ce dernier mécanisme, dont bénéficie chaque local existant au 1er janvier 2017, n’est pas figé à cette date, mais que la valeur locative révisée employée pour le déterminer doit être recalculée chaque année (jusqu’en 2025) (CE, 13 nov. 2023, n° 474735, n° 474736 et n° 474757).
Afin de faire échec à cette jurisprudence, un « planchonnement » figé serait rétabli, calculé selon la situation des locaux au 1er janvier 2017 (CGI, art. 1518 A quinquies, III, 1 et 2 modifiés). Ainsi, le dispositif de lissage des variations de valeurs locatives (« planchonnement ») serait déterminé en application de la comparaison entre la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 et la nouvelle valeur locative révisée à cette même date (et non celle retenue en vue de l’établissement des impositions dues au titre de chacune des années concernées). Ces modifications s’appliqueraient pour les impositions dues au titre des années 2017 à 2025, à l’exception de celles perçues sur les mêmes bases dues au titre des années 2023 et 2024 pour lesquelles des réclamations ont été introduites auprès de l’administration des impôts avant le 10 octobre 2024 (date de présentation du projet de loi de finances en Conseil des ministres).
le report de 3 ans de la suppression progressive de la CVAE (Art. 15) : Il est prévu de reporter de 3 années la poursuite de la trajectoire de suppression définitive de la CVAE restante, d’ici à 2030. Les taux d’imposition à la CVAE seraient maintenus pour les années 2025 à 2027 à leur niveau de 2024, soit, pour le taux maximal, à 0,28 %. Ce taux maximal d’imposition à la CVAE serait ensuite abaissé à :
0,19 % en 2028,
0,09 % en 2029.
La CVAE serait finalement totalement supprimée en 2030.
Taxes diverses⚓
Parmi les mesures concernant des taxes diverses, on peut citer :
l'évolution de la taxe sur les émissions de CO2 et de la taxe sur la masse en ordre de marche (Art. 8) : Afin de renforcer le caractère incitatif à la transition énergétique de ces taxes, les barèmes du « malus sur les émissions de CO2 » et du « malus masse » seraient à nouveau révisés, et divers aménagements seraient apportés à leur régime liés (Art. 8). S’agissant du « malus sur les émissions de CO2 » (CIBS, art. L. 421-62 modifié), pour les immatriculations réalisées à compter du 1er janvier 2025 :
les tarifs seraient augmentés : le plafond du tarif serait ainsi porté de 60 000 € à 70 000 € ;
et le plancher d’émissions de CO2 à partir duquel un véhicule individuel se trouve imposé au malus serait abaissé de 5 gCO2/km (113 gCO2/km au lieu de 118 gCO2/km).
Les mêmes adaptations seraient effectuées pour les 2 années suivantes. Ainsi :
pour les immatriculations réalisées à compter du 1er janvier 2026, le plafond du tarif serait ainsi porté à 80 000 € ; et le plancher d’émissions de CO2 serait abaissé à 106 gCO2/km ;
pour les immatriculations réalisées à compter du 1er janvier 2027, le plafond du tarif serait ainsi porté à 90 000 € ; et le plancher d’émissions de CO2 serait abaissé à 99 g CO2/km.
Le barème applicable en puissance administrative, pour les véhicules qui ne sont pas soumis à la méthode de calcul WLTP, serait également révisé (CIBS, art. L. 421-64 modifié). Le projet procède enfin à un ajustement sur l’abattement bénéficiant aux véhicules de plus de 8 places assises détenus par une personne morale (véhicules destinés au transport public de personnes) afin de neutraliser les effets de cette hausse (CIBS, art. L. 421-65 modifié).
S’agissant du « malus masse », le barème serait également durci, par un abaissement de 100 kg du poids plancher déclenchant l’imposition à la taxe, pour les années à compter de 2026. L’année 2025 serait « épargnée », le barème 2024 restant applicable. Le montant du tarif ne serait pas modifié (CIBS, art. L. 421-75 modifié).
Un ajustement sur les véhicules de transport collectif est par ailleurs prévu, toujours pour neutraliser les effets de cette baisse du poids plancher (CIBS, art. L. 421-77 modifié).
Autre mesure, la limitation du bénéfice de l’abattement de « malus masse » dont profitent aujourd’hui tous les véhicules hybrides non-rechargeables aux seuls véhicules dits « performants sur le plan environnemental ». Ainsi, l’abattement de 100 kg applicable aux véhicules dont la source d’énergie comprend l’électricité serait conditionné à un niveau de puissance électrique supérieur ou égale à 30 kilowatts (CIBS, art. L. 421-79-1).
Ces mesures entreraient en vigueur à compter du 1er janvier 2025, sauf pour celles dont l’entrée en vigueur est repoussée à une date ultérieure (Art. 8, II) ;
l'adaptation de la réfaction de la taxe sur les émissions de CO2 et de la taxe sur la masse en ordre de marche pour les véhicules d’occasion (Art. 9) : Ce dispositif serait modifié en profondeur à la demande de la Commission européenne (Exposé des motifs, Art. 9). La décote unique serait remplacée, dans un premier temps, par un coefficient forfaitaire d’ancienneté progressif (jusqu’à 100 %), variant en fonction de l’ancienneté du véhicule, calculée en mois à partir de la date de sa première immatriculation dans le pays d’exportation (CIBS, art. L. 421-7-2 nouveau). Cette nouvelle variable introduit une réfaction « plus importante pour les véhicules récents, notamment de moins de 6 mois, et moins élevée pour les véhicules anciens, en cohérence avec l’évolution de la valeur du véhicule qui n’est pas linéaire » (Exposé des motifs, Art. 9).
Par exemple, le coefficient serait de 3 % pour un véhicule dont l’ancienneté est comprise entre 1 et 3 mois, de 48 % pour un véhicule dont l’ancienneté est comprise entre 73 et 84 mois. Les véhicules dont l’ancienneté est supérieure à 15 ans, seraient affectés d’un coefficient de 100 %. À compter du 1er janvier 2027, une seconde variable compléterait le coefficient d’ancienneté, à savoir un coefficient d’usage (CIBS, art. L. 421-7-3 nouveau). Ce coefficient s’entendrait d’un pourcentage, compris entre 0 et 3,5 %, déterminé en fonction de la distance moyenne annuelle parcourue par le véhicule, exprimée en kilomètres. La distance moyenne annuelle parcourue serait égale au quotient, arrondi à l’unité, entre, au numérateur, le produit de la distance totale parcourue par le véhicule par 365 et, au dénominateur, l’ancienneté du véhicule depuis la date de sa première immatriculation au sens de l’article L. 421-5 du CIBS, exprimée en jours. Soit :
Distance moyenne annuelle parcourue : Kilométrage du véhicule × 365 / ancienneté du véhicule en jours
Par exemple, pour une distance annuelle parcourue comprise entre 25 001 km et 30 000 km, le coefficient serait égal à 1,5.
La somme de ces deux variables, qui ne pourrait dépasser 100 %, composerait le coefficient forfaitaire de décote (CIBS, art. 421-7-1 nouveau).
Ces mesures entreraient en vigueur à compter du 1er janvier 2025 (Art. 1er, II, 3°), sauf pour celles dont l’entrée en vigueur est repoussée à une date ultérieure (Art. 9, 1°, b).
d'autres adaptations concernant les taxes sur les véhicules : Signalons deux autres modifications des dispositions du CIBS relatives à ces taxes prévues par le projet de loi :
l’article L. 421-30 du CIBS serait modifié afin d’exclure toute référence aux véhicules dont la carrosserie est « Camionnette ». Une disposition spéciale exonérerait ces véhicules du « malus CO2 » et du « malus masse » (CIBS, art. L. 421-30-1 nouveau). Il en est de même de l’article L. 421-36 du CIBS, qui ne ferait plus référence à ces véhicules ;
l’article L. 421-36 du CIBS prévoirait la taxation des véhicules d’occasion pour lesquels le « malus CO2 » ou le « malus masse » n’aurait pas été prélevé à la date de la première immatriculation. Ceux-ci seraient soumis au malus dès lors qu’ils feraient ultérieurement l’objet d’une immatriculation et que les conditions de non-taxation ne seraient plus remplies.
Ces mesures entreraient en vigueur à compter du 1er janvier 2026 (Art. 9, 2°).
Régimes particuliers et dispositifs diverses⚓
Ici, on citera l'intégration des anciennes ZRR dans le nouveau zonage ZFRR (Art. 27) : Si les critères du nouveau zonage ont permis d’intégrer plus de 2 000 communes supplémentaires, 2 168 communes jusqu’alors situées en ZRR en avaient été exclues. Pourtant, leur situation reste caractérisée par des fragilités d’ordre géographique, économique et social. C’est pourquoi ces communes devraient bénéficier du dispositif ZFRR à compter du 1er juillet 2024 et jusqu’au 31 décembre 2027. Un arrêté n° TREB2416551A du 19 juin 2024 a établi la liste complète des communes bénéficiant des effets du classement en ZFRR.
Par ailleurs, afin de cibler au mieux les communes situées en « ZFRR plus », le champ d’application de ce dispositif serait élargi aux communes dont le bassin de vie (et non plus l’intercommunalité) présente des vulnérabilités caractérisées, à compter du 1er janvier 2025.
Autres mesures fiscales⚓
On signalera également :
la prorogation jusqu’au 31 décembre 2031 de l’abattement fixe pour les dirigeants partant à la retraite (CGI, art. 150-0 D ter ; L. fin. 2018, n° 2017-1837, art. 28, VI, C, al. 1er modifié) (Art. 19, II) ;
la correction d’une erreur de renvoi introduites aux article 239 quater A du CGI et 302 septies A bis du CGI par l’ordonnance n° 2023 77 du 8 février 2023 relative à l’exercice en société des professions libérales réglementées (Art. 21) : En l’absence de rectification, le régime fiscal spécifique prévu à l’article 239 quater A du CGI, ainsi que le régime simplifié d’imposition prévu à l’article 302 septies A bis du CGI, ne pourraient plus s’appliquer à défaut de renvoyer aux dispositions idoines de cette ordonnance pour définir les sociétés civiles de moyens.